La progression inquiétante de l'obésité en France

Le Figaro

Sandrine Cabut | 10/11/2009 | Mise à jour : 21:34
Le niveau socio-économique joue un rôle majeur dans le développement des risques d'obésité.
Le niveau socio-économique joue un rôle majeur dans le développement des risques d'obésité. Crédits photo : AFP

Plus de 20 millions d'adultes sont en surpoids ou obèses.

Désormais, en France, à peine un adulte sur deux peut être considéré comme ayant un poids normal. L'obésité progresse de façon inquiétante dans notre pays, selon les résultats de la cinquième édition de l'enquête nationale ObEpi* (voir les résultats en pdf), dévoilés mardi. L'avalanche de chiffres et de diagrammes, présentés par le Dr Marie-Aline Charles, épidémiologiste à l'Inserm et le Pr Arnaud Basdevant, nutritionniste à l'hôpital Pitié-Salpêtrière, à Paris, qui coordonnent l'enquête depuis ses débuts en 1997, a de quoi donner le vertige. En 2009, 32 % des plus de 18 ans - soit 14 millions de personnes - sont en surpoids ; et 14,5 % - soit 6,5 millions - répondent aux critères de l'obésité.



Depuis la première édition d'ObEpi, il y a douze ans, la proportion d'obèses dans la population générale s'est élevée régulièrement, passant de 8,5 % à 14.5 %. Le phénomène est d'autant plus préoccupant qu'il semble inexorable, n'épargnant aucune tranche d'âge. Surtout, de génération en génération, les obésités apparaissent de plus en plus tôt dans la vie. Et elles sont de plus en plus marquées. La fréquence des obésités sévères (indice de masse corporelle supérieur à 35), les plus à risques sur le plan médical, est ainsi passée de 1,5 % en 1997 à 3,9 % cette année. Le taux de personnes en surpoids a lui augmenté plus modestement. En moyenne, depuis 12 ans, chaque Français a grossi de 3,1 kg et son ventre s'est arrondi de 4,7 centimètres.
Réalisée tous les trois ans depuis 1997, avec la même méthodologie, ObEpi est un outil précieux pour les épidémiologistes et les nutritionnistes. Comme la plupart des études dans ce domaine, elle repose sur des données déclaratives. Les participants (un échantillon représentatif de plus de 25 000 personnes en 2009) ne sont pas examinés par un professionnel de santé, mais répondent à un questionnaire où ils indiquent notamment leur poids, leur taille, et leur tour de taille.
Si elle n'épargne aucune catégorie d'âge ou groupe social, l'obésité est loin d'être répartie équitablement (voir infographie ci-dessous). D'abord, les femmes sont sensiblement plus touchées (15,1 %) que les hommes (13,9 %). La progression est plus importante chez les premières, particulièrement pour les formes les plus sévères. Pour le Dr Marie-Aline Charles, cela pourrait s'expliquer par «une plus grande propension des femmes à développer de la masse grasse». Autre facteur d'inégalité : l'origine géographique. Dans la région Nord, qui détient le record national, un adulte sur cinq est obèse. Mais, comme l'ont déjà montré d'autres enquêtes épidémiologiques, le niveau socio-économique joue aussi un rôle majeur. Constamment, depuis 1997, l'enquête ObEpi relève que la fréquence de l'obésité est inversement proportionnelle au niveau d'instruction et aux revenus du foyer. Là encore, les chiffres sont édifiants : en 2009, le taux d'obésité est de 22 % (soit 7 % de plus que la moyenne nationale) dans le groupe de population où le revenu du foyer est inférieur à 900 euros mensuels. À l'inverse, au-delà de 5 300 euros mensuels, le taux d'obésité plafonne à 6 %. «Ce qui est surprenant, note pour sa part le Pr Basdevant, c'est l'existence de formes graves d'obésité chez les plus de 65 ans. Cela confirme notre pratique clinique. Avant, nous n'avions pas de consultants âgés. Aujourd'hui, c'est banal.» Une tendance qui, selon lui, s'explique par la meilleure prise en charge médicale de ces patients.
Un tel bilan remet-il en cause l'efficacité des campagnes de santé publique menées depuis dix ans en France ? «Condamner la prévention avec aussi peu de recul serait une erreur. Pour faire admettre la ceinture de sécurité et la dangerosité du tabac, il a fallu plusieurs décennies», rappelle le Pr Basdevant. Mais selon lui, les messages nutritionnels ne suffisent plus. Il faut aussi axer sur la «facilitation». Autrement dit rendre les fruits et légumes réellement plus abordables économiquement et mener une politique urbaine et sociale qui incite à l'activité physique, comme le démontre l'exemple du Vélib'.
* Réalisée par TNS Healthcare Sofres et financée par les laboratoires Roche
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